BYD au Maroc : entre rêves et réalité


Ça commence de la même façon que tous ces scoops rapportant des déclarations trop rapides, des faits mal avérés et libérant l’imagination des journalistes et de leurs lecteurs. Dans ce cas particulier, c’est un journaliste marocain, Issam El Yadari, qui a soulevé le lièvre en publiant une enquête parue dans le Desk le 13 décembre 2017 : Le Chinois BYD : ni Tanger Tech, ni métro aérien . Cette attitude semblant de plus en plus rare, on s’étonne, on se félicite qu'un journaliste ait son travail ! Ou, plus exactement, n’ait fait que son travail !

La presse chinoise a été aussi sensible à l’emballement médiatique marocain comme le montre le bulletin daté du 10 décembre du bureau de l’Agence Xinhua à Rabat 比亚迪将在摩洛哥设立工厂 mais celle-ci modère ses propos deux jours plus tard et, citant l’AFP, ne parle plus que d’un mémorandum d’entente 谅解备忘录 et non plus d’un contrat 协议 même si le titre de l’article peut toujours laisser penser le contraire 比亚迪将在摩洛哥建厂 开发欧洲与非洲市场. En revanche, le site de BYD www.bydauto.com.cn  ne claironne aucune victoire ni même ne fait allusion à une quelconque opération marocaine.

Nous reproduisons ci-dessous le texte de cet article :

Sur la base de déclarations attribuées en partie à Moulay Hafid Elalamy, la presse s’est emballée à propos des intentions du constructeur chinois BYD Auto Industry, venu présenter devant le roi ses projets futurs pour le Maroc. Certains ont évoqué des usines sur le site de la Cité Mohammed VI Tanger Tech, tandis que d’autres ont conclu à l’exhumation du projet mort-né d’un busway à Casablanca

Beaucoup d’annonces ont accompagné la présentation des projets du constructeur automobile chinois BYD Auto Industry au roi Mohammed VI, dont les contours demeurent encore flous. Celles concernant Tanger Tech ou encore la fourniture d’un busway pour la capitale économique ne seraient que pures spéculations…

« Le projet sera implanté près de Tanger, dans la future Cité Mohammed VI Tanger Tech, une “ville industrielle”  portée par le groupe chinois Haite et dont la création a été annoncée en mars dernier », ont avancé les agences Xinhua et AFP, tandis que les officiels n’avaient pas précisé pas sa localisation, dont Challenge en avait initialement situé l’emplacement à Tanger Automotive City.

Quelques jours plus tard, dans des déclarations à Médias24, Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, de l’investissement, du commerce et de l’économie numérique, se montrait plutôt évasif sur l’éventualité du choix de Tanger Tech pour les futures usines de BYD :

« Jusque-là, avec BYD, nous avons pu définir les besoins : véhicules, bus, camions, batteries et monorails. Mais dès janvier 2018, nous allons tout passer au peigne fin. Il faudra décider de ce que nous allons faire à tel ou tel endroit, de quelle manière, identifier les équipementiers avec lesquels BYD travaillera, négocier avec eux… », a confié le ministre…

UN BUSWAY NOMMÉ DÉSIR… 

Même cafouillage pour le projet de métro aérien de Casablanca exhumé par le ministre : Al Ahdath Al Maghribia rapportait le 12 décembre que Moulay Hafid Elalamy, en a fait l’annonce le week-end dernier. Dans des déclarations à la presse, Elalamy affirmait avoir demandé au spécialiste des véhicules électriques chinois BYD « de lui fournir une étude concernant la livraison, au profit de la ville de Casablanca, de plusieurs rames de monorail électrique ».

Elalamy avait alors ajouté à cette occasion que, pour « résoudre la problématique du transport urbain à l’intérieur de la capitale économique et son hinterland régional, il n’est point de salut en dehors de l’adoption du monorail aérien », d’une portée de 15 km.

Al Ahdath Al Maghribia rapportait même que Casa Tramway avait l’intention « de désigner un cabinet chargé de la réalisation d’études techniques sur les futures lignes de busway qui viendront compléter celles du tramway casablancais ».

« Ni le conseil de la ville de Casablanca, ni la SDL Casa Transport ne sont au courant du projet d’études que mènerait le chinois BYD à propos du métro aérien dans la métropole et qui lui aurait été commandité par Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, selon certains médias de la place », rapporte cependant Medias24 qui cite notamment Youssef Draiss, DG de Casa Transport à propos de ce projet « abandonné ». « Nous avons eu vent de cette information par voie de presse. A ma connaissance, il n’en est rien », a pour sa part déclaré, toujours à Medias24, Abdessamad Haiker, vice-président du Conseil de la ville.

Une clarification par ailleurs reconnue par Moulay Hafid Elalamy qui a « répondu par la négative » au journal électronique, niant ainsi avoir évoqué en ces termes le sujet… 


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