Pétrole au Nigéria : la "tentation chinoise"
Romandie news  du 3 novembre 2009 

LAGOS - Avide de pétrole, la Chine fait les yeux doux au Nigeria pour convaincre le 8e exportateur mondial de lui vendre un sixième de ses réserves prouvées. Avec un argument de poids: de l'argent frais, et beaucoup. Pourtant le Nigeria a poliment dit non, pour l'instant...

Cette boulimie pétrolière, dont il sera probablement question lors du forum Chine-Afrique du 6 au 8 novembre à Charm el-Cheikh (Egypte), est loin de faire l'unanimité au Nigeria.

Au point que tout récemment, en recevant le grand patron de Shell, Peter Voser, le président Umaru Yar'Adua a dit à quel point son pays tenait à conserver de bonnes relations avec ses "vieux" et traditionnels partenaires. Autrement dit: les Chinois, c'est le saut dans l'inconnu.

Implantées depuis des décennies, Shell, ExxonMobil, Chevron et Total, sont engagées dans des discussions serrées avec les autorités qui veulent modifier les règles du jeu, notamment fiscales, via une nouvelle une loi, la Petroleum industry Bill (PIB), actuellement en discussion au Parlement.

Selon des sources du secteur, ces compagnies prévoient d'investir environ 23 milliards de dollars au Nigeria dans les 5 prochaines années. Mais à travers la CNOOC, la China's National Offshore Oil Corporation, Pékin a fait miroiter 30 milliards de dollars pour se garantir 6 milliards de barils nigérians.

Au Ghana voisin, la même CNOOC discute avec la compagnie publique National Petroleum Corporation (GNPC) pour acquérir 23,5% du champ pétrolier de Jubilee (1,8 milliard de barils).

La compagnie privée Sinopec s'est quant à elle récemment offert la société canadienne Addax Petroleum, qui opère au Nigeria et en Afrique de l'Ouest, pour 5 milliards d'euros.

"La force des Chinois, c'est qu'ils sont prêts à mettre beaucoup de cash sur la table", résume le patron d'une multinationale.

Là où le bât blesse, c'est que les société chinoises lorgnent au Nigeria une vingtaine de blocs qui sont déjà attribués et/ou exploités par d'autres compagnies, notamment Shell. "Tant qu'ils veulent venir travailler ici, aucun problème, il y a de la place pour tout le monde, mais pas sur des blocs qui ne sont pas libres", prévient le responsable d'une compagnie.

"Une chose dont vous pouvez être sûr c'est que nous défendrons nos intérêts", déclarait récemment le directeur financier de Royal Dutch Shell, Simon Henry. Certains blocs arrivent à échéance et le Nigeria a renouvelé les licences pour un an.

Le maillon faible, c'est la NNPC, la compagnie pétrolière d'Etat nigériane: le gouvernement veut en faire une société autonome financièrement et capable de générer des bénéfices. Pour l'instant la NNPC dépend du budget de l'Etat pour financer ses opérations en tant que partenaire des multinationales dans des co-entreprises. Mais depuis des années, victime de la corruption et de son inefficacité, elle n'y arrive pas. Alors quand les Chinois débarquent avec leur carnet de chèque...

"Les Chinois ont fait une proposition que nous étudions. Ils demandent six milliards de barils de nos réserves. Nous n'allons pas leur donner tout ça", déclarait fin septembre à l'AFP Odein Ajumogobia, le vice-ministre du Pétrole.

Mais plus récemment, le même Ajumogobia disait que la NNPC pourrait très bien vendre à des sociétés chinoises ses parts dans des blocs. "Pourquoi pas? si l'offre est très bonne. La NNPC a le droit de faire ce qu'elle veut avec ses parts".

EXXONMOBIL
CHEVRON
TOTAL
CNOOC

(©AFP / 03 novembre 2009 12h28)